Daniel HeldLa transformation digitale est un défi pour chacun. Mais il l’est plus encore pour les dirigeants, parce que le changement de paradigme est le plus difficile pour eux. Le défi du leadership pour un monde digital (leadership 4.0) … est un réel défi de posture, parce qu’il s’agit bien plus que de prendre conscience des dimensions essentielles d’un rôle managérial pour réussir le défi de la transformation digitale ensemble avec son équipe. Les approches de développement du leadership sont amenées à entrer elles aussi dans le 21ème siècle, en tirant profit de tous les outils qui sont à notre disposition, mais surtout en travaillant le défi de la posture.

Article AGEFI – Juin 2019 – Daniel Held

Leadership et transformation digitale[1]

La transformation digitale est un défi pour chacun. Mais il l’est plus encore pour les dirigeants, parce que le changement de paradigme est le plus difficile pour eux. Pourquoi ?

La transformation digitale nous mène dans un monde robotisé, connecté et intelligent. Ce monde implique inévitablement d’énormes changements en termes de leadership:

  • Robotisé : la suppression des postes, le replacement des personnes concernées, la montée en puissance des experts pour piloter les robots sont de réels défis. Mais ce sont ceux que l’on connaît le mieux, puisqu’il s’agit là véritablement de gestion du changement, autrement dit de passer d’un état connu A à un état à peu près connu B.
  • Connecté : un environnement connecté offre de multiples opportunités, de connaissance et d’implication des clients, de feedback instantané sur l’impact d’une action, d’intégration dans le même processus à la fois des fournisseurs, partenaires, collaborateurs, distributeurs et clients. Comment s’affirmer dans un contexte dans lequel la transparence règne et où l’information devient le pouvoir de chacun ?
  • Intelligent : le déferlement des solutions incluant l’intelligence artificielle est certainement une opportunité pour créer plus de valeur et donner à l’Homme une place plus importante et plus valorisante, où les 3 dimensions clés de l’« homme sain » – l’esprit, le cœur et le corps – auront tout leur sens. L’Homme, et tout particulièrement le leader qui a pour mission de mettre en puissance son équipe – se trouve donc face à un défi de taille : réussir à faire la différence avec la machine, donc à accéder à tout son potentiel. Pour cela, il devra savoir utiliser son « préfrontal[2]» – en dépassant ses freins (croyances, dogmes, … – « néo-lymbique ») et ses peurs (« reptilien »).

Le défi du leadership pour un monde digital (leadership 4.0) n’est donc pas en priorité technologique, pas plus qu’il n’est d’ordre intellectuel. C’est un réel défi de posture, parce qu’il s’agit bien plus que de prendre conscience des dimensions essentielles d’un rôle managérial pour réussir le défi de la transformation digitale ensemble avec son équipe. Ce défi, qui a bien sûr toujours existé, est de plus en plus criant : les exigences de l’environnement global et connecté augmentent exponentiellement dans le temps et avec le niveau de responsabilité; en même temps, les parcours scolaires, parascolaires et professionnels négligent de plus en plus, selon des études récentes, les composantes clés pour le succès : la résilience ; l’affirmation de soi et la communication ; l’esprit d’entreprise[3].

Les approches de développement du leadership sont donc amenées à entrer elles aussi dans le 21ème siècle, en tirant profit de tous les outils qui sont à notre disposition, mais surtout en travaillant le défi de la posture : ce que « être leader » signifie vraiment à tous les niveaux ; la capacité à proposer une vision, des orientations, du sens et un chemin (stratégie) ; la capacité à s’affirmer positivement dans la relation, à prendre sa juste place, à poser le cadre et les rôles pour mettre en puissance les individus et les équipes ; la résilience, autrement dit la capacité à faire face à de réelles difficultés, à des dangers, à des échecs et à trouver en soi les ressources pour les surmonter ; le sens du Réussir ensemble, pour passer de l’idée à l’action, en dynamisant, stimulant, initiant et conduisant le changement, et bien sûr en atteignant de hautes performances sans mettre en danger son bien-être et son plaisir.

Nous n’y parviendrons pas tant que les approches de développement demeurent cognitives ou techniques, parce qu’elles laissent les acteurs en zone de confort du mental. Ce qui est en jeu, c’est d’arriver à utiliser toutes les potentialités du triangle : Corps ; Émotions ; Esprit, en apprenant à donner toute sa place au préfrontal, mais en l’impact l’impact du reptilien et du néo-limbique, qui ne sont jamais aussi puissants qu’en situation de danger et de pression !

Le monde du développement du leadership va donc profondément évoluer, car l’ère des « gourous » devrait gentiment prendre fin si nous voulons avoir des leaders stimulants pour réussir la transformation digitale. Hypno-coaching, neurosciences, équicoaching, préparation mentale du dirigeant sont quelques pistes que nous explorons activement, et qui donnent à ce stade des résultats très prometteurs. Il y en a bien sûr d’autres. Le défi est réellement de taille, et il serait utile que l’énergie de tous soit consacrée à ce défi, plutôt qu’à continuer à faire vivre des méthodes rassurantes mais qui font désormais partie du passé.

Télécharger le pdf original

 

 

 

[1] 3ème article d’une série sur la transformation digitale. Voir les articles précédents sur : www.piman.ch/publications.

[2] Les neurosciences nous ont permis de mieux comprendre les comportements et résistances face au changement et à l’incertitude notamment, pour mieux les dépasser.

[3] Source : Willis Towers Watson, 2018.